Petits moments de voyage, ces chroniques urbaines nous emmènent à travers le monde, de l’Orient aux Amériques en passant par l’Afrique. Métropoles mondiales ou régionales, bourgades mythiques ou villes cauchemardesques, nous vous embarquons donc sur les traces d’un tourisme urbain bien souvent jouissif ! Population urbaine mondiale en forte hausse (70% en 2050), ce tourisme est d’ores et déjà en pleine (r)évolution !
L'Asie, nouveau centre du monde
Politesse excessive, propreté extrême, importance de l'hygiène, respect des règles, traditionalisme sociétal, bienvenue à Tokyo ! C'est le choc d'un nouveau monde avec des quartiers et une culture unique. Dans la « ville électrique » d'Akihabara, on va de surprises en surprises, entre énormes complexes de jeux d'arcade, maid cafés, librairies qui vendent des mangas porno qui font l'apologie de la pédophilie, ou otakus qui font la queue des heures durant pour tester le dernier jeu Sega. Tokyo est le yin et le Yang, le traditionalisme affrontant sans cesse une modernité nourrie des influences extérieures. Alors qu'à Harajuku,vous verrez des cosplays (costume players), vous croiserez beaucoup de jeunes filles habillées en kimono; des amies portent parfois leurs plus beaux yukatas qui offrent un festival de couleurs. Dans la soirée, les trottoirs de Shinjuku sont remplis d'host boys qui attendent gentiment la clientèle féminine désespérée qui écume les hosts clubs. Les clubs vendent du temps passé avec des garçons qui ressemblent aux héros de Death Note. Ces clones sont payés pour dîner, pour boire été plus (?) si affinités et finances. La tradition japonaise est donc partout, mais partout remise en cause par des pratiques sociales éloignées du calme des jardins, des maisons de thé, des temples bouddhistes ou shrine shintôs. Il vous faudrait un guide pour vous guidez à travers Takeshita, le parc Yoyoji ou Shibuya, quartier célèbre pour abriter le carrefour le plus dense au monde (2 millions de personnes par jour). Ron Fricke en a fait un moment fort de son hymne à la planète Terre (Baraka). Dans un manga cafe, il est possible, pour quelques euros, de réserver une petite pièce confortable avec internet, la télé, des boissons à volonté et l'accès à un nombre hallucinant de mangas. Mangaka au Japon, c'est banco ! Il vous faudra beaucoup d'énergie pour marcher des heures durant dans cette mégapole tentaculaire, dans les quartiers de Ginza, Tokyo Station, Ueno, Roppongi, celui des libraires ou des instruments de musique. Vous assisterez peut-être au phénomène J-pop : pendant que des groupes de jeunes filles aux chorégraphies ridicules s'essayent à un play-back incertain, des groupes d'hommes, mangaotaku, dansent, chantent, jubilent. Sidérant ! Depuis le World Trade Center ou au sommet Tokyo Sky Tree, la plus haute tour métallique du monde, la vue sur la baie, le quartier de la finance, Odaiba ou la tour de Tokyo vaut le détour. Propulsés par un ascenseur supersonique avec des lumières bleues qui rappellent Hal dans 2001, vous atteindrez 452 mètres d'altitude. Vue garantie époustouflante sur l'un des plus beaux skyline urbain de la planète !
Ville-état à la réussite économique insolent, l'État lilliputien (699 km²), où les habitants ont l'un des plus haut PIB au monde par habitant, a le plus fort pouvoir d'achat et la plus forte concentration de millionnaires. À l'image de la Corée ou de HK, le Dragon est plus que jamais réveillé. Il n'y a qu'à se balader dans des centres commerciaux géants à l'architecture futuriste qui rappelle un peu les dessins de François Schuitten ou J-C. Mézières pour être convaincu. Suntec City et Marina Square, 2 immenses malls, proposent des shows gratuits pour attirer les chalands qui iront dépenser des fortunes dans le casino. Le mall en Asie, est une invitation à la consommation, « the place to be » ! Les Gardens by the Bay sont une réussite architecturale assez extraordinaire. D'une végétation luxuriante s'arrachent des arbres artificiels reliés par une canopée suspendue à 22 mètres dans le vide. C'est superbe tout comme ces deux bulles de verre d'une quarantaine de mètres qui abritent un joli jardin botanique et une cascade de 35 mètres, point d'orgue d'une forêt tropicale. Ce poumon de verdure justifie presque à lui seul le surnom de « cité-jardin » de Singapour. Cette métropole immense est un exemple de mixité culturelle : les Autochtones malais représentent 12% de la population, les Indiens 8%, les Chinois 80%. Les Indiens et Chinois sont arrivés après l'indépendance de 1965 pour travailler dans les plantations d'une Malaisie alors britannique. L'impossibilité d'acheter des terres dans ce pays les a poussés à émigrer vers Singapour. Vous engloutirez des heures de marche pour rallier un Little India plus propre que l'originale, le vieux quartier malais pour déguster un laksa, Chinatown et son immense marché qui rappelle un bout de la Chine du Fujian. Ce pays est celui des paradoxes : il a le plus faible taux de fécondité au monde mais la seconde densité de population derrière Monaco. Et pourtant, mis à part à Chinatown, on ne s'y sent jamais oppressé comme dans les mégapoles chinoises ou indiennes. En longeant le deuxième port mondial derrière Shanghai, vous percevrez un peu plus la puissance phénoménale de la « Suisse de l'Asie ». It will be time for Malaysia !
Seoul est une ville qui fascine, pleine de temples, parcs, d'histoire, de maisons basses, universités spacieuses ou rues calmes où il fait bon s'y promener. Hanok Village et les très belles maisons traditionnelles de Samchung-dong sont un vrai bonheur. Je découvre Cheong-gye-cheon, Cheonggyecheon pour une balade verte le long de la rivière artificielle, ou la tour Nam-Sa qui domine la ville. Il y a des détails qui m'interloquent notamment l’importance de la gratuité. Partout, des fontaines sont à disposition, l'entrée des très beaux musées est libre (le SeMA par exemple), les toilettes gratuites sont légion, des ordinateurs sont à disposition dans les gares ou aéroports, les restaurants offrent soupe, « apéritifs » et parfois thé à volonté. Dans le métro, une chose me marque : je suis plus souvent le seul Européen ; cette société ne me semble que peu mixte. La Corée offre des saveurs culinaires exceptionnelles. Comment ne pas tomber amoureux de cette gastronomie qui marie la mer, la passion des BBQ locaux, les soupes, riz.... Seuls les desserts ne sont pas à la hauteur. Que dire du galbi, bossam, teok-guk, U-Dong, meuntang, zam-pong, teok-bo-ki, bulgogi, bibimbab, kimbabn kimchis, kal-guk-su, go-deung-uh jorim, sam-gyup-sain, du hoi, des dark-kochi, de la pieuvre dévorée vivante à la manière de Old boy... J'en passe ! Les enseignes francisées (Paris Baguette, Tous les Jours) ou cafés au nom français font un carton. Seoul vit, est dynamique : la culture du clubbing est forte, les salons karaokés privés sont une institution que l'on quitte tard pour aller avaler du poulet dans un de ces Chicken & Beer qui pullulent et l'on peut louer un salon tout équipé pour regarder son DVD en location. Les motels, peu chers et au confort ultime, accueillent les jeunes couples qui ne partagent pas un logement ou ne peuvent le faire... Société est conservatrice ! Les murs de Hong-dae regorgent de peintures murales ; en amoureux du street art, je suis aux anges... Il n'est plus question de Hyehwa ou Gunja où j'avais mes quartiers, mais de Wangsimni située à 2 pas d’Hanyang University. Direction un convenience store sont ouvert 24h/24. Dans le métro, les livres ont disparu. Les K-zombies sont pendus à des smartphones Samsung ou LG qui font office de bureaux (la connexion 4G est partout) et j'espère... d'e-books ! La lecture n'a donc pas (encore) disparu, alléluia ! Il m'est rare d'y croiser des Visages Pâles ; les Occidentaux seraient-ils à Hongdae, Gangnam ou Itaewon ? Probablement. Je visite le Sendaemun Prison History Hall situé à Seodaemun-gu. La prison de Gyeongseong Gamok, construite en 1907, fut utilisée par l'occupant japonais pour mater la résistance coréenne avec une violence inouïe. Quelques jours plus tard, me voici au marché de Garak, si vivant à la nuit tombée. Sur près de 600.00 mètres carré, les énormes entrepôts de légumes succèdent au marché au poisson où nous choisissons un délicieux loup servi cru puis en soupe. Après le marché aux herbes de Gyeongdong des premiers jours, puis Yak Ryeng Si (le plus grand marché d'herbes médicinales du monde), c'est l'heure de découvrir celui de Dongdaemun centré sur le textile et les chaussures. Il s'agit en fait d'un carrefour qui concentre, j'en mettrai ma main à couper, l'un des plus gros centres d'achats de textile de la planète. C'est gigantesque : les centres commerciaux s'enchaînent et Occidentaux, locaux, Japonais viennent faire des affaires jusqu'à tard dans la nuit (les mall ferment vers 5h du matin !). C'est l'été est il fait chaud à Séoul, les fortes pluies ont disparu. Il me plaît de passer du temps au café à écrire et développer mon jeu de plateau relatif au voyage, tout en rencontrant nos connaissances communes. En fait, il fait presque trop chaud pour rester en extérieur : ça tombe bien, car la clim', c'est fantastique ! Le long de la rivière Han, le spectacle est folklorique. Il ne faudrait pas grand-chose pour se croire à un festival de musique estival. Les tentes sont partout et sous le même pont qui offre un maximum de fraîcheur, le tableau ressemble de loin à un camp de réfugiés du HCR. C'est un vrai bordel, le confort en plus. Passé la joie de découvrir les miracles des toilettes hi-tech coréennes, nous filons découvrir Gangnam, le tube de l'été après le carton de Psy, et ce mecju chang-go (bar à bière). C'est l'heure du so-mec (soju + bière). Pour finir l'été, nos amis nous embarquent dans un « camping » pour un barbecue traditionnel. Au fin fond de Séoul, cela ressemblerait presque au banquet gargantuesque qui conclut chaque album d'Astérix !
KL est un carrefour culturel : y vit une petite communauté noire, quantité de Chinois, beaucoup d’Occidentaux attirés par le poids de la ville dans le monde de la finance. Entre monde Indien et Moyen-Orient, les musulmans sont ici majoritaires, les femmes voilées très nombreuses. Suis-je toujours en Asie du sud-est ? Je me pose la question, la faute à une gargote où la moustache des serveurs et le carry me renvoient en Inde. Rajoutons les currys de Little India et le décor est planté ! Le mix est intéressant mais la ville est ennuyante. Il n'y a rien à faire, exception faite du shopping dans des malls incroyablement nombreux... C’est pire que tout ! Les Malais adorent passer leurs journées à rechercher un brin de fraîcheur dans ces endroits climatisés. Entre restos, cafés, spectacles de pom-pom girls et l'Iphone dernier cri greffé à la main... on s'éclate à KL, temple de la consommation et du capitalisme ! Me voici à la découverte des seules Twin Towers encore debout (sic !), de parcs qui manquent de charme et de pique-niqueurs. Je me pose à Chinatown, le seul quartier qui me plaise et où l'architecture ne titille pas le Ciel. Ami(s), à KL passe ton chemin ! Et pourtant, j'y reviendrai... Elle représente encore toujours tout ce que je n’aime pas : un trafic routier insupportable, une place plus que limitée aux piétons, une place démesurée donnée aux centres commerciaux, une architecture sans charme et j’en passe. Se lancer à l’assaut de cette ville est épuisant. Notre hôtel miteux n’est pas loin du célèbre marché de nuit d’Alor Street. La rue n’offre que peu de variétés : quelques tim sum chinois souvent à base de porc, les basiques de la nourriture malaisienne et quelques autres douceurs sucrées et c’est à peu près tout ! Le nasi (riz) est servi à toutes les sauces : nasi goreng, nasi lemak, nasi ayam… Rajoutez une pincette de curry et de noix de coco, beaucoup de nouilles plus ou moins fines, et vous vous direz qu’il faudra manger cela midi et soir pendant des jours. Avant de rejoindre les tours jumelles en soirée pour assister au spectacle quotidien des fontaines sur KLCC Square, nous voilà dans les grottes hindoues de Batu. C’est un sanctuaire sacré pour les millions d’Indiens qui vivent dans la péninsule. Les marches qui pénètrent la montagne sont assiégées par des macaques très moqueurs et voleurs qui ne rechignent pas pour prendre la pause. Après quelques heures, Maghnia comprend - enfin - mon aversion pour cette ville. Le quartier indien ? Ennuyant au possible. Les malls ? Temples du capitalisme, ils sont climatisés à l’extrême. On y gèle ! Heureusement, Madame a une idée de génie : un dîner dans le ciel. Les pieds suspendus à une quarantaine de mètres du sol, nous dînons dans le ciel de la capitale malaisienne avec vue sur les tours Petronas, le CBD et autres, car la table est tournante ! Les plats sont excellents, les assiettes créatives et délicieuses, la musique au top. C’est une expérience magique !
Nous atterrissons à Koweït City, « la Ville » d’un État entré, malgré lui, dans l’histoire médiatique en 1991. Des Koweïtiens, vêtus de kamis, s’engouffrent dans un bus peu confortable - conduit par un Punjabi qui nous offre une douceur - aux côtés des nombreux migrants (70%). J’imaginais une société plus fracturée à l’image de celle des Émirats, mais aussi une skyline plus impressionnante. Du haut des tours, il est évident que la capitale concentre 90% de la population. Nous nous installons dans un café pour le petit-déjeuner koweïtien de toute beauté avant de pénétrer dans la Grande mosquée. De dehors, rien ne semble exceptionnel. Tout faux ! La visite guidée gratuite en met plein la vue. Les femmes vêtues de l’abaya obligatoire, nous pénétrons dans l’immense salle de prière ornée de calligraphies somptueuses des 99 noms d’Allah. Tapis, lustres, décoration en or, portes massives en teck, couleurs superbes, marbre italien, c’est franchement grandiose ! Au sortir de cette merveille, nous rallions la salle des visiteurs pour avaler quelques dattes et le karak (thé koweïtien) très fort et très sucré, et récupérer quelques souvenirs. Le tout gratuit… Bienvenue en Arabie ! En ralliant le marché aux poissons, les bhums (boutres traditionnelles) renvoient au passé maritime florissant. Au loin, un pétrolier traverse la baie tandis qu’un pont sans fin la traverse ; on devine les deux îles artificielles et l’échangeur construit sur le polder. Je comprends vite que le conservatisme koweïtien est bien ancré. Ce n’est pas ici que je compléterais ma collection d’étiquettes de bière. Le lendemain, nous voici de retour aux premières heures du jour à attendre l’ouverture des cafés koweïtiens. C’est une nouvelle chance que d’humer, l’espace de quelques heures, les spécificités d’un pays qui doit avoir tant de mal à se faire une place entre ses encombrants voisins iranien ou saoudien. On enchaîne les karak devant une flopée d’hommes vêtus d’un blanc immaculé avant un nouveau petit-déjeuner de roi. On découvre rapidement Al Sadu, le tissage traditionnel en laine des femmes bédouines. Maghnia a coché une course de chameaux sur sa to do list ! Après négociation, un taxi accepte de nous emmener au stade malgré ses doutes ; en face, des chameliers du Soudan nous présentent leurs bêtes de course. Celle-ci a eu lieu à 6h ce matin… Pas grave ! Dans la « Ville », nous assistons à une étrange cérémonie en musique pour accompagner le café. Avant que la tombée du jour efface les traces du retour vers la zone urbaine, il est temps de partir. Avant notre vol retour, nous tuons le temps dans une zone commerciale et de loisirs qui ressemble à ce que l’on pourrait trouver dans n’importe quelle métropole. Satanée mondialisation !
ginal pour un « voyage de noces » !
Jakarta est étouffante, invivable. C’est le genre de monstruopole que seule une démographie non maîtrisée et des infrastructures à la peine peuvent enfanter. Elle serait d’ailleurs la 2ème métropole la plus peuplée du monde derrière Tokyo. Les ruelles qui nous emmènent vers une laverie de fortune transpirent les égouts et la crasse. Ces quartiers à deux doigts de l’hôtel sont à coup sûr privés d’accès à l’eau potable comme 40% des habitants de la ville… « The Big Durian » ou l’enfer sur terre. En raison d’une circulation chaotique (le mot est faible), il faut des heures pour rallier les quelques centres d’intérêt de la capitale : l’ancien Stadhuys de Batavia la néerlandaise, le Musée du Wayang ou le monument national. Nous arriverons même trop tard pour voir le mémorial dédié aux victimes des meurtres de masse de 1965-1966. La purge anticommuniste organisée par l’armée indonésienne marqua le début du règne de Soeharto, l’un des innombrables dictateurs des amis-ricains. Elle décima le parti communiste (PKI) et écarta du pouvoir Soekarno, l’architecte de l’indépendance et l’une des figures de proue du tiers-mondisme (l’organisateur de Bandung). Réputée pour sa street food, Jakarta déçoit encore. Vive les Pop Mie ! Le sourire des enfants de Kelapa harbour puis la découverte du wayang (marionnettes traditionnelles) en compagnie d’un vieux passionné nous donne du baume au cœur. Il nous en faudra davantage pour nous remettre de la déception Bogor, pourtant qualifié de « petit village romantique » par Thomas Raffles. Direction Borobudur et le Bromo (c’est ma faute !), la Sulawesi ou Bali !
Nous arrivons dans un hôtel de Mumbai à 00h05 après 35h30 de train. Elle ressemble à Delhi ou au Caire : invivable et surpeuplée. Me voilà dans l’ancienne Bombay coloniale qui avait surgit dans mon existence à la lecture d’un Jules Verne, Le tour du monde en 80 jours bien sûr. Selon le Morning-Chronicle, il fallait désormais 13 jours entre Suez et Bombay, 3 pour rallier Calcutta ! De cette époque britannique, il reste de beaux bâtiments art déco et victoriens comme la gare Chhatrapati Shivati Terminus achevée en 1888 et baptisée le jour du jubilé de l’impératrice Victoria. Que c’est beau l’empire des Indes ! Pour rallier les grottes d’Elephanta, situées sur une île autrefois nommée Gharapurin, il faut embarquer Porte de l’Inde, le symbole de la ville qui commémore la visite de George V et de la reine Mary en 1911, mais aussi d’un pats devenu indépendant. Les dernières troupes britanniques à quitter le pays passèrent sous celle-ci en 1948. Sur Elephanta, les temples et statues consacrés à Shiva Mahadeva se détachent de la roche avec bonheur. Un macaque me vole ma boisson et sur le chemin du retour, un Indien me vomit dessus ! Dans le centre de la ville, on sent la puissance financière d’une monstruopole d’une vingtaine de millions d’habitants. Elle serait la 10ème ville la plus peuplée au monde, l’une des 10 plus importante plateforme financière de la planète, le siège de la Banque de réserve indienne d’un BRICS ultra puissant et produirait 5% du PIB du pays. Vertigineux. Mais jusqu’à quand ? Avec la montée des eaux, les ¾ de sa population est en effet menacée… Le bidonville de millionnaire de Dharavi, bien plus que les quartiers aisés évidemment ! En « balade » dans la ville, je me sens oppressé par le bruit, les odeurs, la chaleur harassante d’une saison humide commencée depuis juin, la surpopulation. Il faudra éviter à tout prix la mousson. À la gare ferroviaire, je vis mon propre Slumdhog Millionnaire, me voici dans mon Bollywood à moi ! Des événements tragiques me ramènent sur Terre. Tristement. Ils me rappellent que l'Inde, avec ses castes, ses tensions entre communautés religieuses - Chrétiens, Sikhs, Musulmans ou Hindous -, ses problèmes diplomatiques et frontaliers (Orissa, Punjab, Jammu-Kasmir), est loin d'être « peaceful ». Comment peut-il en être autrement dans cette société modelée par l'hindouisme où l'Occidental ne peut se convertir et reste quoi qu'il advienne inassimilable ? Tels les sâdhus (les ermites), j’erre dans les rues de Mumbai la cosmopolite ou plus tard de Kolkotta loin de mes repères et mon identité. Un verre de chai à la main, je tends l’oreille pour reconnaître marathi, hindi, gujarati, anglais ou le mélange de toutes ces langues, le bambaiya. Avec un certain bonheur !
Le sac déposé, nous découvrons de belles choses : un surprenant marché de nuit où l'on peut goûter du crocodile ou de la tortue et le temple de Longshan qui mêle, avec une certaine réussite, cultes bouddhistes et taoïstes. Ce syncrétisme cultuel me révélera rapidement que la tolérance religieuse est à Taïwan une valeur forte. Ici, le christianisme catholique ou protestant cohabite aisément avec l'ikuantaoisme, le bouddhisme du Petit Véhicule, le confucianisme et le tao/Dao (la Voie). Les Dragons asiatiques ont fondé leur ascension économique sur les valeurs religieuses régionales (loyauté envers le groupe, respect des supérieurs, esprit de famille) et la société taïwanaise semble presque entièrement modelée par ces cultes. Ainsi, comment comprendre autrement la médecine chinoise, la pratique du tai-chi, le culte des ancêtres, le feng-shui, le yin et le Yang ? Dans les temples, les enfants jouent au basket-ball, les adultes au mah-jong, assouvissent leur passion du karaoké, prient Bouddha, Mazu (la déesse de la mer) ou la philosophie de Lao Tseu. Le temple est, à l'image de la mosquée, un lieu de socialisation. Le lendemain, me voilà plongé dans le Taïwan historique, celui du docteur Sun Yat-Sen (fondateur de la première République de Chine en 1912) et surtout du Généralissime, Chang-Kai Check bien sûr ! Dirigeant du Kuomintang, en lutte contre la Chine communiste, il se réfugie dès 1949 à Formose avec plusieurs centaines de milliers de Chinois pour reprendre la Chine continentale. Malgré son échec, il fonde la République de Chine et met en marche la propagande anticommuniste qui tournera à plein régime. Malgré ses merveilleux marchés de nuit qui, chaque soir, me transportent vers de nouvelles saveurs faites de porc mariné, patates douces cuites sur des galets, tofu grillé à l'odeur si forte, soupes de bambous, poissons, champignons épicés, huîtres, langoustines rôties, saucisses, feuilletés (youtiao), pains au sésame, maïs grillé, brioches fourrées à la vapeur..., les pluies fortes nous chassent de la capitale. À nous les gorges de Taroko !
Il m'aura fallu à peine quelques heures pour tomber amoureux de ce pays. Il y règne une atmosphère incroyablement relax loin du brouhaha du Vietnam et de l'attitude souvent irritable de ses habitants. Ici, c'est shanty shanty, un bout d'Afrique de l'Ouest en Asie. La capitale Vientiane semble une petite ville de province sans trafic avec ses multiples restos le long de la rive gauche du Mékong, qui marque la frontière avec la Thaïlande. Nous sommes à 2 pas de Nong Kai, la voisine thaïlandaise. Les premiers explorateurs français débarquèrent en ville dès le XIXème siècle, en 1893 pour être précis ; elle devint donc capitale du protectorat français en 1899. L’Indochine française a légué de beaux bâtiments, des villas coloniales, plutôt des maisons de maîtres. Que reste-t-il de sa fondation du XVIème siècle par le roi Setthathirath ou son père ? Sûrement plus grand-chose, la faute aux Birmans qui l’ont pillée Le plan quadrillé rend la balade facile… Sera-t-il de même dans quelques années alors que la ville a entamé une expansion brutale depuis le début des années 2000 ? Posés sur les bords Mékong, du Fela Kuti ou Osita Osadebe s'échappe d'un bar nigérian. Heureux celui qui écoute de l’afrobeat ! Un jour, à Lagos j’irai !
Depuis Seoul, le KTX Train permet de rallier rapidement la métropole subtropicale de PBusan pour le weekend. De cette métropole multimillionnaire, je me rappelle de la plage urbaine d’Hauendae, l’une des plus populaire du pays. Des buildings qui vont vers le ciel sont à 2 pas d’une jolie plage de sable. L’ancienne Fousan promet des balades urbaines tranquilles, culturelles. C’est le centre éducatif, scientifique (instituts de recherches en biologie, technologies marines, hydrographie ou océanographie) et culturel du sud du pays. C’est aussi un centre économique majeur avec son port maritime, probablement le 3ème de la planète… On monte à Gamcheon, un village culturel niché à flan d’une montagne. L’ancien bidonville est bien coloré ! Nous nous enfonçons dans les ruelles étroites du marché aux poissons de Jagalchi, situé près du port de Nampo ; c’est l’un des plus vastes marchés aux poissons de la planète. Les jagalchi ajumma (« femmes de Busan ») animent le marché comme jamais. À Pusan, l’histoire du XXème siècle n’est jamais très loin : le surnom de ces femmes rappelle la guerre de Corée, la colonisation japonaise transforma le port et l’utilisation d’une langue étrangère dans un quartier témoigne de l’apport des Russes dans le commerce régional. Dans le marché de Jagalchi, on se régale de hoi, ces tranches de poisson cru qui fondent dans la bouche. Comment ne pas tomber amoureux de cette gastronomie qui marie la mer, la passion des BBQ locaux, les soupes, riz ? Que dire du galbi, bossam, teok-guk, U-Dong, meuntang, zam-pong, teok-bo-ki, bulgogi, bibimbab,kimbab, kimchis, kal-guk-su, go-deung-uh jorim, sam-gyup-sai, des dark-kochi, de la pieuvre dévorée vivante à la manière de Old boy... et j'en passe ! À Hanguk, seuls les desserts ne sont pas à la hauteur !
Delhi me révulse. Je n'arrive pas à me faire à cette ville, son bruit, ses odeurs, ses quartiers administratifs d'un ennui mortel. Je tue le temps comme je peux, entre balades dans le Old Delhi et au marché aux fleurs... Ma 1ère à Delhi fut donc un choc : pauvreté, densité de population, épices, bruit, tout n’était pour moi qu’agression. La ville semble plus calme, la circulation moins chaotique. Nous arrivons seulement au milieu des 5 jours que dure Diwali, la fête des Lumières. Nous voilà à vagabonder à travers une métropole qui sent toujours autant la pisse. Avant même Old Delhi, le thé n’attend pas. On file à Jama Masjid, l’immense mosquée moghol qui peut accueillir 25.000 fidèles, au fort Rouge, voir une belle citerne, puis dans la magnifique nécropole de la dynastie moghole (dont la tombe de l’empereur Humâyûn). Au sortir de la visite, le jardin de style perse accueille la sieste de ceux qui, comme Ulysse, ont fait un long voyage. Nous voilà surtout dans les lieux de culte qui font l’intérêt d’un voyage en Inde. Dans ce temple sikh, des kirtan sont chantés avec justesse. Ils me rappellent l’expérience du Temple d’Or d’Amritar, la ville sacrée de la religion fondée par Guru Nanak au XVIème siècle. Non loin, nous voilà dans un lieu de culte jaïn, une religion qui se considère comme immémoriale. Dès le lendemain, l’Inde spirituelle, celle qui fait frémir les Occidentaux avides d’orientalisme et mal dans leur peau, montre son vrai visage. Dans le centre de pèlerinage qu’est Mathura, c’est l’heure du racket ! Dans la « Krishna Historical House », un guide hausse le ton pour que les fidèles versent leur obole… Sur le retour, gare à vos lunettes si vous ne voulez pas que des singes dressés vous les dérobent ; vous les récupérerez contre rétribution ! Rebelote à l’entrée du Keshav Dev Temple où Maghnia se fait interviewer. Construit sur le présumé lieu de naissance de Krishna, huitième avatar de Vishnou et divinité la plus vénérée de l’Inde, le caissier tente de nous arnaquer. C’est dommage, car les centaines de bougies posées dans des diya (les lampes en argile) qui forment des mandalas et un immense svastika invitaient au mysticisme. Il ne manque plus que ces sectaires d’Hare Krishna qui récitent chaque jour mille sept-cents soixante-dix-huit fois le même nom divin pour couronner le tout ! Le lendemain enfin, après nous avoir montré le Gurudwara Bangla Sahib, un vieux sikh nous fait bien comprendre que notre donation est loin d’être suffisante ! De Delhi à Pokhara, notre voyage sera trop souvent celui de la chasse aux tips et à l’argent « facile ». Le soir à Connaught Place, les premiers signes de lumières (des lanternes) apparaissent dans le ciel avant que les feux d’artifice envahissent la ville. C’est franchement n’importe quoi. Des feux sont lancés au pied des fils d’électriques et retombent au pied des voitures, des rickshaws ou de Morgan plus qu’ébranlé par cette ambiance de guerre civile. Le petit n’est pas au mieux !
Puisqu’il faut bien commencer un voyage quelque part, nous partons à la découverte de Phnom Penh, l’ancienne « Perle de l’Asie » de l’Indochine située au confluent du Tonlé Sap et du Mékong. Il est plutôt agréable de s’y perdre, d’y arpenter les rues assis à l’arrière d’un rickshaw, de relier les nombreux stûpas pour y observer une vie spirituelle foisonnante ou ce village du Quart-Monde peuplé de pêcheurs musulmans qui habitent des maisons sur pilotis les pieds (presque) dans l’eau et surtout dans une mer(de) de plastique. Si cette expérience est dure, je m’attendais à une mégapole bien plus invivable et polluée. Or, il n’en est rien. En visite à la fin des années 60, le Premier ministre de Singapour confia au roi Sihanouk « j'espère qu'un jour ma ville ressemblera à la vôtre », et recommanda à ses ministres de s'en inspirer. Après un court passage dans notre superbe hôtel qui surplombe une ville qui construit de partout, nous voilà à la découverte du Wat Phnom (ou « Colline du temple »), édifice du XIVè siècle qui donna son nom à la ville. La ferveur religieuse qui s’en dégage nous subjugue. Le Marché Central, leg de l’époque coloniale, nous permet de découvrir quelques-unes des saveurs qui agrémenteront notre voyage. Soupes, lok lak, nouilles et riz sautés, tom yam, pain à l’ail, crêpes, amok, relents de lait de coco, curry, gingembre ou de piment et sauce poisson, la cuisine khmère me réjouira jour après jour.
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