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Voyage culinaire en Australie

Dernière mise à jour : 29 déc. 2019


N’en déplaise à Bacchus, si la consommation de vin progresse à toute allure, c’est du côté de Gambrinus que les Australiens tournent encore très majoritairement leurs palais assoiffés… Et quand il s’agit de joyeusement lever son coude, ces dames ne sont d’ailleurs nullement à la peine ! Il n’est pas rare de rencontrer de joviales donzelles commandant allègrement leur "schooner", un copieux "glass of beer" contenant tout de même ses 425 ml, voire leur "jug", une sorte de pichet dépassant largement l’énorme chope que nous nommons pourtant déjà le "Formidable" ! Assez curieusement, si les termes sont identiques, les contenances varient d’une région à l’autre. À l’égal du reste des marques, chaque État ayant pratiquement la sienne. Les plus couramment consommées sont les blondes peu alcoolisées, la Victoria Bitter, gentiment nommée "vi bi ", se taillant la part du lion, titillée tout de même par la Tooheys, la Cooper's ou encore la XXXX, que l’on appelle communément "Four X". À côté de ces Lagers à fermentation basse produites par les quelques géants se partageant l’essentiel du marché, l’amateur peut aussi enchanter ses papilles avec de fort goûteuse blondes à fermentation haute, aussi bien qu’avec des brunes ou des ambrées façonnées artisanalement par de petits brasseurs locaux. Il faut évidemment les chercher un peu, en s’écartant de ces immenses pubs ou de ces énormes stations-service proposant tout à la fois l’alimentation du véhicule et celle du gosier…


Entre deux pintes d’une bière tout ce qu’il y a d’ordinaire et servie pratiquement glacée, vous y engloutirez les éternelles frites copieusement couvertes de ketchup, accompagnées de la fameuse "meat pie", une sorte de grasse tourte fourrée d’un steak haché, de lard et puis d’oignons. Toujours hachée, à la machine et non pas au couteau comme l’exige notre authentique tartare, la viande peut aussi se transformer en saucisse pour devenir "sausage roll", s’apparentant à nos friands. Dans ce trop bref survol des usages culinaires au pays des si mignons koalas, du surf au milieu des requins, des célèbres Wallabies, ces éternels rivaux des All Blacks, et du magnifique Opéra de Sydney, nous aurions tort d’oublier la pratique du barbecue dominical, avec viandes rouges au préalable marinées, et plus encore le petit pot de Vegemite ! Cette drôle de pâte un peu salée, aussi sombre que gluante, mélange extraits de fruits, épices et levure de bière. Très riche, paraît-il, en vitamines B, elle se tartine sur des toasts avec bonne couche de beurre ! Au petit-déjeuner, un gastronome élevé dans les saveurs hexagonales trouvera l’odeur pour le moins curieuse et le goût point vraiment attrayant…  

Reste évidemment cette cuisine, qualifiée souvent de "primitive", mais qui recouvre en vérité les mille et un délices dont se régalaient les aborigènes. Ils étaient, depuis plus de 40 000 ans, rappelons-le, les citoyens de ces immenses contrées, dépourvues en ces temps de toutes espèces de clôtures ou de barrières, que des colons sans vergogne sont venus occuper, à la suite du capitaine Cook, comme leurs copains l’ont tristement fait du reste aux quatre coins de la planète… Aussi civilisés que nous, ces chasseurs-cueilleurs, parlant plus de 600 dialectes, faisant chanter le didgeridoo et ayant érigé les peintures rupestres en véritable art, se délectaient des produits de cette terre qui ne leur appartenaient pas, mais à laquelle ils appartenaient, avant leur extermination presque totale. Pendant que les femmes ramassaient les plantes, graines et fruits sauvages et attrapaient les lézards et les poissons, les hommes, armés de leur seul boomerang, chassaient le kangourou, l’émeu ou le varan. Ces nourritures s’appréciaient crues, séchées ou encore fumées à la feuille d’eucalyptus.


Pour en revenir à Bacchus, les premiers ceps furent plantés par les colons vers la fin du XVIIIe siècle aux alentours de Sydney. Aujourd’hui, les surfaces plantées dépassent la superficie du vignoble bordelais. Avec une production méritant, pour une petite partie au moins – je pense notamment aux régions de Barossa, Arossa, Clare et Eden Valley, à celle du Coonawarra réputée pour son riesling ou encore à Margaret River -, qu’on s’y attarde ! Notre chère syrah, admirable dans le haut de notre vallée du Rhône, se plait sous ce climat particulièrement sec. Appelée ici shiraz, elle bénéficie, à l’égal des cépages pinot noir et cabernet sauvignon pour les rouges et de leurs cousins riesling, chardonnay, sémillon, sauvigon ou autre gewurtztraminer pour les blancs, d’une irrigation presque permanente, une pratique strictement interdite chez nous, sauf pour les vins de Pays, mais totalement autorisée en Australie, y compris pour les meilleurs domaines.


Privilégiant le cépage, sur le terroir, les quelques très bons breuvages australiens que j’ai eu le plaisir de déguster se sont montrés sont charnus et généraux, fruités et assez forts en alcool. Assez "technologiques" – la différence se joue ici très largement sur les talents du viticulteur et non sur le produit vendangé par le vigneron – ces vins peuvent séduire une clientèle désireuse de retrouver d’identiques saveurs quelles que soient les années…


Jacques Teyssier,

Journaliste gastronomique pour CoolinClassic

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