Juin 2009
En arrivant à Casco Viejo, le quartier historique de Panamá City, l’ambiance est étrange ; les rues étroites non éclairées sont de véritables coupe-gorges. D’ailleurs, le lendemain soir, il s’en faut de peu que je me fasse dépouiller. Ça me rappelle les quartiers sordides de Mexico City ou Ciudad Guatemala. Dans la capitale financière qu'est Ciudad Panama, je me mets dans la peau du Pierce Brosnan du Tailleur de Panamá qui se déroule à San Felipe. Je déguste mes premières Panamá et Balboa avec un voisin de table tout fraîchement élu président de la République (Ricardo Martinelli). On est au Café Havana, le lieu idéal pour préparer une opération CIA en Amérique centrale, un coup tordu dont ils ont le secret !
La journée, les anciens bus scolaires américains donnent des couleurs à une ville étouffante tellement le taux d’humidité est élevé. Dans les supérettes, les Chinois ont le monopole, tandis que les noirs balayent les rues et que les Colombiens investissent le bâtiment. Comme souvent, je fuis la ville pour la sérénité d’une jolie plage. À 5 heures, on monte dans une jeep pour 2 heures de traversée d’une jungle qui abrite le paresseux. Avec ses 365 îles, l’archipel des San Blas est un joyau brut. Pas d’eau ni d’électricité, si ce n’est un panneau solaire qui ne sert qu’à éclairer quelques heures une table où se rassemblent des voyageurs s’échangeant leurs impressions ou une boutique où l’on vend bières, snacks, herbe et le sachet de cocaïne pour un dollar… La Colombie est proche, la police - par le fait de la législation d’une région autonome gérée par les indiens Kuna Yala - absente, les cargos transportent à coup sûr des marchandises douteuses. Mais le repos est garanti sur Islanda Robinson où il n’y a rien d’autre à faire que contempler la beauté des plages à l’eau transparente ou jouer au volley. Voici Matt, un Canadien vraiment cool, Mitt le Gallois, Flo un Allemand avec sa coupe old school, un couple d’Israéliens sympathiques, deux croque-morts de NYC bien bizarres, mais malheureusement aussi trop d’Israéliens qui voyagent en groupe et passent leur temps à bouffer et chanter israélien en parlant avec nostalgie de leurs années de service ! Enfin, Marco un Italien de Naples qui habite à Genève, voyageant 18 mois avec sa casquette vissée sur la tête. Marco, c’est toute une histoire.
Le temps file doucement dans l’archipel et Islanda Perro où l’on rencontre Ellen une Norvégienne, Melisa une Bosniaque réfugiée là-bas avec sa soeur Nada dont le prénom signifie Espoir. On snorkel dans une épave à quelques mètres d’une plage encore une fois somptueuse. Les filles s’en vont camper à Islanda Hollandes à 2 heures de bateau. Pourquoi pas. C’est beau comme dans un rêve où l’on s’attend à voir capitaine Jack Sparrow une bouteille de rhum au poing nous conter ses périples. À part une famille qui vit de noix de coco, il n’y a absolument rien. Et c’est ça qui est bon ! On nous sert d’énormes langoustes pour trois francs six sous ; en snorkel, on n’est pas en veine car les eaux sont réputées pour leur abondance de raies mantas, requins, tortues... Après 10 jours coupés du monde, nous voilà retraversant la mangrove.
Le bar du casino Fiesta est rouge de maillots d’une sélection nationale tout juste éliminée de la Copa de Oro. Ça ne les empêche pas de faire la fête au son d’une musique caribéenne brûlante (merengue puerto-ricain, bombas ou salsas cubaines, cumbias ou rancheras mexicaines, haitero...). Un orchestre colombien provoque une fureur festive tant les Colombiens sont nombreux dans le pays. Puis nous voilà au People. Là aussi les sons caribéens (dancehall jamaïcain, salsa romantica, soca de Trinidad et Tobago, platas et salsas porto-ricaines...) règnent presque sans partage sur une jeunesse déchaînée. Le lendemain, pas vraiment aux aurores, on se rend à Miraflores, la porte d’accès Pacifique du canal de Panamá conçu par les Français puis les Américains et construit par des miséreux venus des Antilles françaises, Western Indies ou Europe. Les bateaux qui relient les Caraïbes y sont peu nombreux (40 maximum par jour) mais payent le prix fort d’une économie de temps considérable. La manne financière est colossale, le canal rapporte à raison de 5 à 6 millions de dollars par jour près de 2 milliards de dollars au gouvernement. Devant mes yeux, un monstre de 300 mètres a dû payer 350 000 dollars la traversée... C’est la poule aux œufs d’or qui n’est pas prête de s’arrêter ! Enfin, au son de jolis merengues et meringues panaméens, on se rend dans les montagnes de l’ouest, refuge du seul volcan du pays, le mont Baru...
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