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Photo du rédacteurCoolinClassic

Cap Vert - La diva aux pieds nus

Dernière mise à jour : 9 nov. 2022

Avril 2017

A l’aéroport de Praia, rapide tour d’horizon : direction Sal, l’une des 6 îles de l’archipel des Barlavento (les îles au vent) du « petit pays » chanté par la légendaire « diva dos pés descalços ». Notre hôtel est une sorte de Disneyland au milieu d’une région aride fouettée par les vents qui fait le bonheur des kitesurfers du monde entier. Les tempêtes de sable du Sahara arrivent parfois jusqu’aux confins des îles cap verdiennes, situées pourtant à 650 km des côtes continentales africaines. Par la faute des vents et courants violents, la mission snorkeling et plongée sous-marine sera repoussée de jour en jour pour ne jamais voir le jour. Sal, l’île du sel, nous offre quelques bons repas et des soirées musicales arrosées au vin cap verdien, au grogue (rhum + mélasse), au pontche et à la bière locale. Ici, le tourisme semble ravager la côte de ses complexes hôteliers dégueulasses, parfois à l’abandon. Si l’ancien village de salins de Santa Maria ne fera pas notre bonheur, les mines de Pedra de Lume ou le joli village d’Espargos sauveront le début du séjour gâché par le tourisme de masse.

Nous fuyons donc pour l’île tropicale sèche de Sao Vicente. Le climat est aride et les journées sont chaudes, presque parfaites pour engloutir quelques kilomètres à bord d'un aluguer qui nous permettra de commencer deux trekkings : le Monte Grande et ses 774 mètres d’abord, la plage de sable blanc de Baia das Gatas puis Salamansa et Mindelo ensuite. Peu de végétation mis à part de jolis acacias mais de belles marches à travers des paysages secs, des villages endormis à l’image des pueblos abandonnés des westerns spaghettis, des plages soufflées par les alizés. Un resto, une crêperie, c’est le bout d’un monde avant une transatlantique! L’île est joyeuse, belle, festive. Sa capitale, Mindelo, est l’épicentre de la culture créole cap verdienne bien riche en influences caribéennes, africaines et européennes. Nous logeons dans le Casa Café où Césaria Evora a fait ses débuts; sa maison est proche, son influence gigantesque. Ça chante Sodade et Petit pays partout où nos souliers nous portent. Cette morna magnifiée par sa voix sera le fil directeur de notre périple bien musical. Coladeira, version accélérée de la morna, ou funana, dansée clandestinement jusqu’à l’indépendance tardive de l’archipel (1975) - ses paroles prônaient, rendez-vous compte, la justice et la liberté! -, la musique est reine. On danse aux sons des gaïta (accordéons), cavaquinhos, ferrinhos, guitares ou violons. C’est magique, comme cette soirée commencée à l’apéro fait de tapas de muraines, olives et autres saveurs, poursuivie dans un bar grillagé à partager la table de ces amis belges et terminée très tard dans la nuit dans cette boîte de nuit aux sons de musiques, cette fois, bien merdiques. Vous l’aurez compris, l’île découverte le jour de la Saint-Vincent 1462 abrite une scène artistique vibrante, des concerts un peu partout et de jolis marchés couverts de fruits et légumes et de poissons. Avant de partir, je m’essaye, sans grand espoir, à un snorkeling dans les eaux de Porto Grande. Mindelo, je reviendrai l’année prochaine pour danser sur quelques batucadeira, tabanka, découvrir ton carnaval et l’île toute proche de Sao Nicolau dont on nous a fait les louanges.

Escale rapide à Santiago, l’île principale du pays. Ici, c’est un peu plus l’Afrique de mes voyages de jeunesse, celle des marchés d’Afrique de l’Ouest. L’influence brésilienne est ici moindre. Le finaçon et le batuque, musique rejetée autrefois par l’Eglise et l’administration, y font fureur. Saïmon et moi découvrons avec un grand plaisir le mignon centre de Praia, notre très cool guesthouse managée par l’excellente Suelly, de nouveaux musiciens cap verdiens, cet immense terrain tombé dans les mains d’investisseurs chinois qui voient les choses en (très) grand ou une jolie plage qui me donne un grand sourire aquatique une fois mon masque et mon tuba fixés. Déjeuner dans l’ancienne capitale Cidade Vehla… A regarder la petite baie qui fût, jadis, attaquée par des pirates dont le célèbre Francis Drake, c’est un grand bonheur. Sur la place centrale, la communauté sénégalaise, présente en nombre comme partout dans le pays, essaye tant bien que mal de vendre quelques babioles face à un pilori qui rappelle l’histoire de colons portugais qui firent du Cap Vert, l’une des étapes des traites négrières.

Un ferry, - à quelques heures près - plutôt ponctuel, nous emmènent à Fogo, l’une des 4 Sotavento (les îles sous le vent). Son vin est réputé, nous en buvons et abusons tout au long de nos pérégrinations, dans la très belle Sao Filipe ou à Cha de Caldeiras. Un 4x4  nous dépose dans l’antre de la bête, une immense caldeira ceinte dans un cirque absolument titanesque. Tout ici est fait de silence, de lave. C’est le Mordor de Tolkien, l’hostilité permanente d’un milieu volcanique fait de cendre et de roches. La mémoire de l’éruption tragique de 2014, qui a chassé les ¾ de la population, est bien présente. Mais pourquoi partir lorsque l’on a grandi dans l’île du Feu? Ze, nous accueille dans sa maison où l’on mange délicieusement bien. Si la nourriture est d’ailleurs plus que correcte dans ce pays entre la cachupa, l’atun, le garupa (mérou), le churrasco (viande grillée), le café est, paraît-il, exquis. Après la montée et un retour au village dantesque du petit cône volcanique en compagnie de Pierre, il nous quitte, j’en suis sûr, la larme à l’œil!; nous nous attaquons au Pico de Fogo (2829m), accompagné d’un portugais qui nous conte sa longue marche pour relier Compostelle. Quelques mètres à gravir le stratovolcan puis il subit, nous lâche, puis redescends, en nous avouant plus tard qu’il est asthmatique. Pour fêter notre dernière soirée, nous voici à la recherche d’un improbable « bar » où un père et son fils chantent, encore et toujours, du Cesaria Evora. Bien malin avant d’attaquer la rude descente qui conduit nos jambes et nos genoux fatigués jusqu’à Mosteiras. A l'aube de quitter l'archipel, je comprends mieux cette légende que  Dieu créa le monde et jeta la poignée de terre restante dans l’Atlantique pour donner naissance aux îles du Cap-Vert... Une rapide dernière soirée à partager musique et pontche avec des locaux et un ancien G.I d’une rare stupidité, et nous voilà déjà à Alfama en compagnie de Mady, mon amie lisboète rencontrée lors de mon tour du monde sur une plage festive de Langkawi en Malaisie. Demain, c’est déjà Paris!


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