Août 2009
« Cette ville est très belle et je finirai par me laisser prendre par son enchantement. Je finirai par devenir paresseux. » Tels sont les mots utilisés par Corto Maltese dans Fables de Venise. Ils correspondent exactement au Montréal qui séduit tant. Les espaces de verdure sont partout, le calme et le silence règnent en maître sur d'innombrables rues ombragées ou l'on ne croise pas un chat à l'exception de quelques cyclistes. Les maisons ont un vrai charme avec leurs escaliers en colimaçon extérieurs, partie intégrante de la ville. Cette ville bilingue où l'on ne sait plus vraiment si l'on doit aborder les gens en français ou anglais me parle d'autant plus que les francophones se sont débarrassés de notre vouvoiement qui, au fond, ne sert pas à grand chose. L'influence française est très forte, ne serait-ce que ces cafés qui quadrillent les blocks. Et la soirée ou nous emmène Guillaume est pleine de compatriotes, car le Mont Royal est le quartier ou la communauté française a ses habitudes. La ville est traditionnellement divisée entre francophones à l'est et anglophones à l'ouest. A Mailand, on y croise aussi beaucoup de juifs orthodoxes dont je ne sais s ils sont ou non francophones. A Montréal, la vie culturelle est florissante l'été, les festivals s'enchaînent comme si chaque jour était le dernier. Les Francophonies, car la musique québécoise est riche de talents (Jean Leloup, Arianna Moffatt, Damien Robitaille...), le festival reggae où il y a deux ans nous avions écouté des sound-systems locaux et le Last war riddim magnifié par Collie Buddz, le plus gros festival de jazz au monde qui avait offert l'excellente afrobeat new yorkaise de Nomo ou le blues rugissant d'un Texan à la longue barbe blanche, le Juste pour rire qui fête la rue et l'humour, sans oublier le Festival d'été de Quebec tout aussi passionnant : Mamady Keita ou le génie de Mahmoud Ahmed !
Le marché Jean Talon transpire les odeurs visuelles. Un tableau de magnifiques cantaloups, bleuets, légumes de saison, pêches et fleurs. Sylvain et Marie, devenus des amis depuis notre rencontre dans une agence de voyage de Marrakech, nous y emmènent. Sylvain est dans son paradis gastronomique. J'aimerais qu il rencontre papa jacques que l'on verrait bien au milieu des épices, trattorie italiennes, bouchers, étals arc-en ciel... La veille, nous avions fêté dans la maison de la sœur de Marie le retour de la famille au pays après leur périple new-yorkais. Vins et barbecue nous avaient remis de cette interminable remontée de NY, onze heures dans la jungle du trafic automobile.
Le lendemain c'est dimanche. Les Piknik Elektonik de Jean Drapeau nous mettent l'eau à la bouche ; à la fin du mois, ils reçoivent le légendaire label Ninja Tune... on enrage ! On se tâte puis on file au Mont Royal rejoindre les amoureux des percussions. Typiquement nord-américain ces drums circle. C'est un joyeux bordel avec des jongleurs, acrobates... Après quelques jours, on se rend compte aussi que beaucoup de gens fument de l'herbe à Montréal. Dans la rue, aux terrasses des cafés... boire une bière dans un parc semble davantage gêner la police. D'ailleurs, on raconte qu'ici comme à NYC, c'est Domino's Weed, livraison à domicile avec échantillons représentatifs des produits ! On finit par avaler une délicieuse poutine. Dans un café où l'on débarque, on en sert pas moins de 30 différentes. La poutine, une institution. Anciens fontenaysiens, Miss Angela et Miser Vince ont débarqué il y a deux mois pour vivre leur rêve. Ils ont trouvé du boulot, elle - ne riez pas - au Café des cyclistes. Le temps de passer au Dépanneur du coin, le seul lieu ou l'on peut acheter de l'alcool jusqu'à 23 heures, et c'est l'apéro. Le vin est cher, c'est donc parfait pour goûter de nouvelles bières inconnues de nos palais (Raftman, Labott...). Dans leur appartement douillet rue Brebeuf, je découvre la highlight nigériane des années 70, une sorte de soul funk jazzy qui n'est pas sans rappeler l'afrobeat originelle. C'est très bon et rien que pour ça, je les embrasse. Nous voici à travers Sainte-Catherine et dans la « ville souterraine », enfin à La Distillerie, un bar hype ou l'on sert de bon mojitos. Le lendemain, rebelote avec les amis français. Un petit tour au Musée d'Art Moderne où les photographies de Robert Polidori, un artiste qui vit à NY, sont poignantes... et nous voila - la bonne blague - au Massilia, sous titré « L'unique bistrot marseillais » situé avenue du Parc, soit dans la même rue que Le Parc des Princes, un autre bistrot français! Les logos kitchs de Ricard et bien sur de l'OM sont bien là.
C'est la dernière à Montréal. Au hasard des volontés de notre vélo, on retourne à Jean Talon pour un délicieux tiramisu, puis on flâne dans une ville sensationnelle. Nous voilà devant la plus ancienne brasserie d'Amérique du Nord (Molson Dry), à Sainte-Catherine à regarder quelques parties de beach volley, face à de très beaux graphs, dans des rues d'une extrême tranquillité. Nous ne sommes jamais allés à San Francisco, mais on parierait qu'avec ses hippies, sa culture décalée et underground, elle ressemble un peu à Montréal. SF ou un nouveau rêve d'aventures...
Comments