Après nos aventures culinaires en Colombie, Malaisie ou Côte d’Ivoire, nous voici à la découverte du Brésil, en réalité d’une gastronomie régionale plurielle, celle du cinquième pays le plus vaste de la planète, qui a profité d’influences européennes (allemande, italienne, française et bien sûr portugaise à l’image du bacalhau a bras…), japonaises, libanaises ou amérindiennes. Assiettes peu travaillées, variété des lieux de consommation, cuisine simple, fraîche et plutôt variée, bem vindo ao Brasil !
À chaque région ses variétés
Chaque région possède ses spécialités. Dans le Nordeste, le bœuf séché et salé (carne seca, carne de sol) est une institution alors que le Minas Gerais est réputé pour sa purée de haricots noirs (tutu a mineira) ou son poulet à la cocotte cuit dans son sang avec légumes (frango ao molho pardo). En descendant vers le Sud, vous comprendrez peut-être que les apports des cultures européennes sont majeurs dans la construction du pays. Ainsi, vous découvrirez que les spécialités sont allemandes (saucisses, choucroute, brasseries locales qui célèbre l’Oktoberfest) ou italienne (pizza). Ce dernier plat est d’ailleurs devenu, au fil du temps, l’une des attractions de la cuisine paulista. En effet, la pizza de São-Paulo est une véritable institution, tout comme la cuisine libanaise et les restaurants de sushi. Si vous savez que la ville compte la plus grande population japonaise hors du pays, cela ne vous étonnera pas !
Pizze et Japonais... bienvenue à Sao Paulo !
En continuant vers le sud (Extrême-Sud), il s’agira de faire honneur aux traditions gaucho : erva maté, tereré, bœuf à la manière du cupim (une sorte de zébu) ou accompagné parfois de chimichurri (à base de persil frais, origan, ail, poivre, huile d’olive et vinaigre) et dégusté en picanha, saignante et salée… et dans une churrascaria ! Au Brésil, comme chez ses voisins argentins, uruguayens et paraguayens, les viandards sont d’ailleurs des rois. Servie souvent très (trop) cuite, la viande inonde nombre de tables du pays. Dans l’État de Rio, il vous faudra goûter une feijoada traditionnelle (un ragoût de viande, haricots noirs avec du riz, de la couenne de porc, du chou kale et du farofa – une farine de manioc revenue avec ail et sel –) de préférence un samedi. Si vous aimez davantage le poisson, direction l’Amazonie. Les Tupi cultivent et mangent du manioc, des poissons de rivière, des patates douces, mais aussi des fruits, haricots et de l’açaï. Nous vous conseillons la caldeirada (une sorte de bouillabaisse amazonienne), le tacacá (un bouillon de manioc salé aux crevettes séchées et feuilles de cresson de l’Amazonie servi dans une calebasse), et surtout açaï et guarana glacés. On aime !
Au centre, le tacacá amazonien / En haut à droite, le farofa
Si le Centre-Ouest jouit également d’une tradition gaucho avec ses immenses fazendas qui cultivent porcs, bœufs, maïs, riz, manioc ou chou frisé cuit braisé, il n’est également pas en reste pour ce qui est du poisson ! Le Pantanal reste le paradis des pêcheurs où l’on peut sortir pintado (poisson chat), dourado, pacù ou encore le célèbre piranha. Les poissons seront souvent grillés (grelhado) mais aussi servis en soupe. Celle de piranhas est une merveille ! Enfin, dans l’État de Bahia, les origines africaines du Brésil se font sentir. Parmi les spécialités, essayez la moqueca (un ragout poisson à la noix de coco, piment fort – malagueta – et huile de dendê) ou le bobó de camaraó (crevettes au lait de manioc, lait de coco). Vous devrez marcher sur les traces de Jorge Amado (Bahia de tous les saints) en goûtant, comme Antonio Balduino, l’acarajé, un beignet bourratif (purée haricots noirs frits dans le dendê – huile de palme – farci à la crevette séchée) et en buvant des coups à La Lanterne des noyers !
La cuisine bahianaise
Au rayon des boissons, il y en a pour tous les goûts
Rayon boisson, il y en a pour tous les goûts, des boissons alcoolisées aux innombrables jus de fruits tropicaux. Le matin ou l’après-midi, il sera aisé de se régaler de fruits mixés dans du lait façon milkshake ou d’un suco naturellement sucré. Goyave, tamarin, mangue, orange, papaye, cerise de la Barbade (acerola), prune du Brésil (umbu), banane, pastèque, avocat, fruit de la passion…, les combinaisons parfois relevées de légumes ou de gingembre sont légions. On ajoutera à ce tableau, les jus de fruit amazoniens (açaí, graviola, cupuaçu, fruta do conde – pomme-cannelle –), le caldo de cana (un jus extrait des tiges de canne à sucre) et évidemment, l’agua de côco, star des parcs et plages brésiliens ! Les amateurs de thés et infusions seront déçus, tant le Brésil est un pays de café. Il est souvent très fort et sucré, servi com leite, ou le reste de la journée dans un verre ou une petite tasse et sucré (cafezinho). On en trouve dans les hôtels avec des thermos à disposition. Ainsi, les amoureux du thé que nous sommes ont dû se contenter de thés negro ou d’infusions d’herbes sans trop de saveurs. Il faudra à tout curieux goûter l’erva maté (le maté ou thé des Jésuites) dans la région frontalière des Missions, et le tereré « paraguayen » sa version froide et franchement dégueulasse ! Rayon alcool, les bières (Bohemia, Original, Antartica, Ouro Fino, Pilsen Pura Malta) sont bues bem gelada en chope (pression) ou en bouteille, ici appelées long neck… Vous comprendrez aisément pourquoi. En accompagnement d’une viande, vous essayerez peut-être ces vins du Rio Grande do Sul issus des vignobles italiens. À Lapa ou ailleurs, c’est toujours l’heure des cocktails à la mode brésilienne : caïpirinha (la boisson nationale à base de cachaça, citron vert et sucre), caipiroska (version vodka) ou caipisaké, mais aussi de ces « caïpi » où le citron vert a été remplacé par d’autres fruits (ananas, mangue, kiwi, pitaga – une sorte de cerise –, fruit de la passion). Enfin, les Brésiliens sont à l’image de leurs voisins américains, amateurs de sodas. Essayez-en un local, le guarana (à base de la plante guaraná).
De la cuisine de rue aux restaurant au kilo
Comme nous l’avons dit, il ne faudra pas attendre une assiette joliment présentée et travaillée. La cuisine brésilienne se déguste dans la rue, au fast-food, dans les bars qui servent des fritures, à l’image des botequim (le « pub » brésilien), mais aussi dans des snack-bars qui ne payent pas de mine. Les échoppes de rue sont parfaites pour un en-cas (lanche), parfois relevés de piment rouge bien fort ou de mon ami le Tabasco. On y trouve aisément des beignets, des pasteis (sortes de tartelettes farcies aux crevettes, fromage, palmier…), des empañadas, des coxinha (croquettes frites garnies principalement de bœuf ou de poulet), des bolinhos de bacalhau (croquettes de morue) adorées de Maghnia, des empadas de camarão (chaussons aux crevettes), des crêpes de tapioca préparées à partir de la fécule de manioc et de noix de coco râpée, des quibes (boulettes frites de blé concassé garnies de viande épicée), du manioc bouilli, ou à Lapa, des hot-dogs à la mode brésilienne (avec des œufs et des chips de frites)… N’oublions surtout pas le roi des échoppes, à savoir le pão de quejo (gougère au fromage) qu’on trouve absolument partout !
Au centre, les fameux pão de quejo
Le lanchonete (snack-bar) est l’endroit parfait pour avaler un plat du jour pas cher, le prato feito, souvent composé de riz et haricots noirs accompagnés d’une viande ou d’un poisson. Le voyageur devra, dans tous les cas, tester au moins une fois un restaurant por quilo, une véritable institution où l’on choisit le buffet à volonté ou de payer au poids. Si ces restaurants populaires permettent de manger de la salade et des crudités, on y trouve toujours les bases de la cuisine brésilienne (riz, haricots), mais aussi des plats cuisinés, des légumes frais, de la viande grillée, ou de quelques sobremesas (desserts). Citons les gâteaux, les fruits au sirop – pruneaux, abricots –, les sorbets (de coco, de tapioca…), les fruits confits, le flan au caramel, la crème de lait, ou l’excellente mousse de fruit de la passion. Ces plats sont servis rodízios, c’est-à-dire qu’ils sont proposés au fur et à mesure qu’ils sortent du four. Si vous avez les bourses pleines (excepté des restaurants au kilo, il est vraiment cher de bien manger au Brésil, il ne faudra pas oublier de tester des restaurants plus hauts de gamme et une traditionnelle churrasqueria (grill) où la viande est également proposée par les serveurs à la mode rodízio (dès qu’elle est prête) !
À droite et à gauche, deux sobremesas
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